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14.06.2023

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Date

14.06.2023

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Lucie Engdahl
Responsable communication

Mobiliser et unir : le plaidoyer dans les projets genre

Mardi 23 mai 2023, une table ronde participative à la Maison de la Femme à Lausanne a permis un échange entre patricien·ne·s de la coopération internationale sur les dimensions du plaidoyer et de la mobilisation dans les projets intégrant un travail sur les questions de genre et d'inclusion. Cette rencontre a permis d’aborder les enjeux liés à la coopération au développement et aux mobilisations féministes en Suisse et ailleurs.

Cet événement, co-organisé avec E-CHANGER, a réuni le partenaire de cette dernière, la Marche Mondiale des Femmes (MMF) au Brésil et celui d’Eirene Suisse, Gulu Women’s Economic Development & Globalization (GWED-G) en Ouganda. Ces deux organisations ont présenté leur travail et leurs actions de plaidoyer dans le cadre de projets axés « genre ». Carolina Fontes dos Santos, doctorante à l’IHEID, spécialiste des mouvements féministes au Brésil, a abordé la question des mouvements et mobilisations féministes selon une approche intersectionnelle[1], permettant de comprendre la manière dont les différentes formes d’oppressions et de rapports de pouvoir s’articulent les uns aux autres.

Les échanges ont traité de l’imbrication et de la place des revendications sociales et féministes dans les actions de lutte et de plaidoyer de ces mouvements. En effet, les oppressions sociales liées aux différents rapports de pouvoir structurels, exprimés par exemple dans des attitudes de xénophobie, d’homophobie, de sexisme, de nationalisme, ou encore d’élitisme, ne peuvent pas être dissociées de la revendication principale qui est la lutte contre l’oppression faite aux femmes. De cette manière, il a été question de montrer comment le concept d’intersectionnalité peut être utilisé par les mouvements sociaux, le militantisme et les actions de plaidoyer dans les différents contextes.

Ainsi, Sonia Coelho, porte-parole de la Marche Mondiale des Femmes (MMF) au Brésil a présenté l’association comme étant un mouvement féministe international, anticapitaliste et antiraciste, initié dans l’année 2000, et qui illustre la dimension de convergence des luttes. Cette Marche a débuté sous la forme de campagne pour lutter contre les violences sexistes et interpeler la responsabilité des organisations multilatérales en matière de pauvreté et d’inégalités. Il s’agit ainsi d’un mouvement qui aborde toutes les problématiques structurelles, telles que la violence, le droit à l’avortement, le droit du travail, les discriminations de classe et de race.

LA MOBILISATION COMME ACTION DE PLAIDOYER

Dans la mobilisation féministe, le mouvement collectif est utilisé comme outil de plaidoyer pour produire une pression par la force du nombre, mais aussi comme moyen permettant de susciter des échanges et de visibiliser les oppressions et les inégalités sociales. Il s’agit d’un processus constant dans les différentes activités de mobilisation, comme par exemple les groupe de parole ou les marches dans les rues permettant de créer des liens, des slogans et une auto-organisation. Le rassemblement collectif constitue une première victoire qui est le pouvoir d’agir et le pouvoir de générer une voix collective.

Charlotte Ziegler, coopérante en Ouganda au sein du Gulu Women’s Economic Development & Globalization (GWED-G), a présenté les approches de plaidoyer de cette organisation comme consistant à visibiliser les femmes. Le but est d’identifier des femmes leaders afin de créer des espaces d’échange pour que ces dernières puissent sensibiliser et former d’autres femmes sur leurs droits afin qu’elles deviennent à leur tour des femmes leader. Le processus de plaidoyer de GWED-G consiste ainsi à créer des espaces de dialogue permettant de faire entendre la voix collective.

LE RÔLE DE LA COOPÉRATION AU DÉVELOPPEMENT DANS LA MOBILISATION COLLECTIVE

Dans les luttes féministes, la coopération au développement renforce mutuellement les parties impliquées, à savoir l’organisation qui porte le projet, dans notre cas en Suisse, l’organisation partenaire et les populations concernées dans la région du projet, dans une démarche de réciprocité.

L’organisation porteuse répond aux demandes et aux besoins d’organismes de la société civile des pays du Sud Global, dans le but de collaborer ensemble au renforcement des capacités de manière durable.

En effet, la coopération au développement agit sur le long terme à travers les liens et les mises en réseaux qui se créent entre les différents pays. Les acteurs de la coopération jouent ainsi un véritable rôle de passerelle pour le développement des capacités et du partage des savoir, afin de faire avancer les luttes et de tisser des liens durables.

Il est essentiel de souligner que cette passerelle est bien à deux voies : ainsi, dans le cadre de la construction des mobilisations comme outil de plaidoyer, il est possible d’identifier des démarches et des actions pouvant être des sources d’inspiration pour les luttes en Suisse. Dans ce sens, il s’agit d’un renforcement mutuel, donc d’un renforcement Nord-Sud mais également Sud-Nord.

En savoir plus sur la thématique du genre et de l'inclusion


Présentation de Sonia Coelho, porte parole de la Marche Mondiale des Femmes (MMF) au Brésil


[1] L'intersectionnalité est un concept sociologique forgé par Kimberlé Crenshaw (1989) qui vise à designer la manière dont les différentes formes d'oppression comme le racisme, le sexisme, le classisme, le validisme, l'homophobie, la transphobie, entre autres, s'articulent et se renforcent mutuellement.