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05.06.2019

[3/9] Partenariat pour le développement, quel est l’avis des spécialistes ?

Depuis sa création, la Fedevaco fonctionne grâce à l’engagement bénévole de ses spécialistes. Au cœur de l’action, ce sont eux qui vivent et font vivre une grande partie de la coopération au développement vaudoise. Nous nous arrêtons un instant en leur compagnie pour découvrir leurs réflexions sur ce qu’est et ce que sera le partenariat pour le développement.

Depuis 30 ans, la Fedevaco est capable de mener à bien sa mission première grâce au précieux engagement de nombreuses et nombreux bénévoles dont l’expérience et le savoir-faire sont au service des organisations membres. Leur contribution est en effet cruciale ! Annuellement, pas moins d’une cinquantaine de personnes donnent environ 4000 heures de leur temps libre en faveur de la Fedevaco.

Concrétement, ces bénévoles sont répartis dans cinq instances et trois groupes de travail dont la responsabilité et les tâches varient. Pour cet article, nous avons interviewé trois bénévoles répartis dans trois différentes instances. Parmi celles-ci figure la Commission d’information – dont fait partie Aline Mugny – qui a pour objectif principal l’élaboration et la mise en œuvre de la stratégie d’information. Deuxièmement, la Commission technique – dont fait partie Nicolas Jammet – analyse, évalue et procède au suivi des projets au Sud menés par les organisations membres. Finalement, le Conseil – dont fait partie Pierrette Rohrbach – pilote notamment les décisions stratégiques de la Fedevaco. Sans plus attendre, découvrez la vision du partenariat pour le développement durable de ces trois spécialistes proches de la réalité suisse et internationale.

La vision globale

En introduction, le « partenariat pour le développement durable » est défini à l’unisson par Nicolas Jammet et Aline Mugny comme une manière de se rassembler pour faire face aux enjeux globaux que sont la préservation de l’environnement et la nécessité pour chacune et chacun de vivre dans la dignité. Pour Pierrette Rohrbach, ce terme correspond à tout ce qu’entreprend la Fedevaco avec ses organisations membres, notamment par leurs actions sur le terrain. 

Seule, il est difficile d’avoir un impact. C’est en mettant ensemble les connaissances, les compétences et les ressources que l’on peut faire la différence

L'engagement

Interrogée au sujet de sa position d’actrice du développement dans le réseau vaudois, Aline Mugny met en avant la nécessité de mutualiser les ressources individuelles pour atteindre un objectif plus ambitieux : « Seule, il est difficile d’avoir un impact. C’est en mettant ensemble les connaissances, les compétences et les ressources que l’on peut faire la différence, d’où ma motivation à faire partie de la Commission d’information ». Une vision partagée par Pierrette Rohrbach qui est devenue membre du Conseil en 2016 avec la ferme intention de mettre son expérience de la vie associative au bénéfice de la Fedevaco. « C’est en constatant les améliorations au quotidien des autres ici et au loin » qu’elle trouve du sens dans son rôle d’actrice du développement. Nicolas Jammet, avec sa casquette de membre de la Commission technique, décrit son rôle comme ayant des teintes « partenariales ». Autrement dit, il se perçoit un peu comme « de l’huile dans les rouages parfois rouillés entre bailleurs de fonds, organisations porteuses de projets et bénéficiaires finaux ».

Un partenariat réussi : quelles fondations requises ? 

Concernant les éléments centraux permettant à un partenariat d’être réussi, les avis de nos trois interlocuteurs semblent converger. Toutefois, leur priorisation varie. Si aux yeux de Pierrette Rohrbach les éléments clefs sont la confiance réciproque, la loyauté et la transparence, Nicolas Jammet rappelle que chaque partenariat doit d’abord émaner d’une volonté conjointe. Le rejoignant en partie, Aline Mugny précise que selon elle, la base fondamentale d’un partenariat réussi réside dans l’équilibre entre les partenaires, lequel est permis par une forme de réciprocité d’intérêt et de complémentarité de compétences. Ces derniers permettent d’éviter la dépendance d’une partie sur l’autre, et ainsi de nuire au partenariat sur le long terme. A ce propos, Nicolas Jammet et Pierrette Rohrbach soulignent l’importance d’ouvrir et de soigner un espace de dialogue qui permette d’aborder aussi librement que possible toutes les éventuelles frustrations surgissant au fil du temps. 

L'expérience

Interrogés sur une expérience qui les rend particulièrement fiers, nos interlocuteurs nous font part d’expériences personnelles, toutes liées par un caractère fédérateur. Pierrette Rohrbach évoque le souvenir d’un partenariat avec l’organisation membre qu’elle préside actuellement, Public Eye. A l’époque, elle était engagée auprès de la Fédération romande des consommateurs et avait approché et collaboré avec la Déclaration de Berne (aujourd’hui Public Eye) sur le thème de l’éthique dans la confection et les conditions de travail dans l’industrie du textile, en Asie notamment. Une campagne qui avait permis de sensibiliser les consommateurs-trices quant à leur pouvoir d’action pour un développement durable et responsable. 

Cette campagne de sensibilisation n’aurait jamais pu être portée par une seule organisation au vu de l’énergie et des défis qu’elle représentait

Aline Mugny se remémore l’organisation d’un projet d’information soutenu par la Fedevaco sur la souveraineté alimentaire. « Cette campagne de sensibilisation n’aurait jamais pu être portée par une seule organisation au vu de l’énergie et des défis qu’elle représentait. Autour d’une thématique porteuse, divers acteurs – dont DM-échange et mission, mon employeur – se sont mobilisés dans l’entier du canton de Vaud, et même plus largement. Ce projet est un exemple de partenariat multi-acteurs réussi, il a atteint des objectifs qui n’auraient pas été envisageables sans toutes les forces de ces différents réseaux ».

Lorsque Nicolas Jammet était coordinateur du Centre Ecologique Albert Schweiter en poste au Sénégal, il avait répondu à un appel à projet de l’Union Européenne qui mettait en lien plusieurs partenaires européens et sénégalais. « Avant de passer au montage du projet proprement dit, nous avons tenu une première séance afin d’identifier les forces et faiblesses de chaque institution participante, et les intérêts à collaborer ensemble sur ce projet. Finalement, nous avons réussi à faire ressortir quelles étaient les plus-values de ce partenariat », nous explique-t-il. Le succès du projet s’explique notamment par ce temps donné à l’écoute et la mutualisation tant des capacités que des intérêts.

Quid du « partenariat pour le développement de demain » ?

Pour Nicolas Jammet, « la situation actuelle nous place malheureusement face à une raréfaction des ressources financières et à des enjeux politiques entrainant une nécessité de redevabilité et de justification des actions de plus en plus forte. On peut citer en exemple la Direction du développement et de la coopération, qui a changé un certain nombre de règles ». Même si ce durcissement des « règles du jeu » ne touchera pas immédiatement la Fedevaco, il questionne l’aspect unilatéral de ces prises de décisions. C’est pourquoi il pense qu’un organisme comme la Fedevaco peut finalement jouer un grand rôle dans les « partenariats de demain », en assurant un lien entre des acteurs aux réalités et aux enjeux différents voire a priori opposés, mais dont la mise en commun entraine surtout des plus-values.

En réfléchissant au partenariat de demain, Aline Mugny observe une tendance de fond à s’ouvrir aux partenariats publics-privés. Actuellement, les types de partenariats se décloisonnent, et deviennent plus inclusifs et créatifs: « Pendant longtemps, nous avons eu des partenariats très classiques et au jour d’aujourd’hui, nous sommes de plus en plus appelés à trouver d’autres formes de partenariat ». Un renouvellement de format qui n’échappera pas à la nécessité d’inclure la notion de durabilité au cœur de son action, nous dit-elle.

L’être humain ne sera jamais un robot et la solidarité ne doit pas disparaitre de notre vocabulaire

Pierrette Rohrbach, quant à elle, pense que le partenariat de demain devra s’adapter aux changements sociétaux et politico-économiques, avec des compétences à la hauteur des défis à relever. « C’est d’ailleurs un vrai défi que de maintenir la solidarité dans un monde en mouvement où certaines puissances se moquent de la dignité humaine. Ce sera à nous de garder à l’esprit l’essentiel : que l’humain soit respecté dans sa dignité. Les projets peuvent souvent sembler être des gouttes d’eau dans l’océan. C’est alors important de se rappeler que toutes ces gouttes d’eau contribuent à former des rivières, rien n’est futile, même à petite échelle. L’être humain ne sera jamais un robot et la solidarité ne doit pas disparaitre de notre vocabulaire ».


Notre démarche 

En 2019, la Fedevaco fête ses 30 ans. A cette occasion et en guise de remerciement à nos nombreux partenaires qui ont fait et marqué la vie de la Fedevaco, nous publions 9 portraits personnalisés de partenaires. Par cette mise en valeur originale et humaine, nous souhaitons relever nos points d’ancrages, qui aujourd’hui, nous permettent de regarder vers l’avenir.